Comment s’applique le droit de préférence d’un locataire dans le cadre d’un bail commercial ?

Comment s’applique le droit de préférence d’un locataire dans le cadre d’un bail commercial ?

Le droit de préférence, souvent appelé « droit de préemption », est un mécanisme juridique qui permet au locataire d’un bail commercial de disposer d’un avantage particulier lors de la vente du bien commercial par le propriétaire.

La loi n°2014-626 du 18 juin 2014 dite Loi Pinel permet au locataire d’un bail commercial de bénéficier d’un droit de préférence en cas de vente des murs par son bailleur (Art. L145-46-1 du Code de commerce). Ce droit donne au locataire la priorité pour acheter le bien, à des conditions égales à celles offertes à un tiers.


1. Les conditions pour bénéficier du droit de préférence

A – Le bail commercial

Seuls les locataires ayant conclu un bail commercial peuvent disposer d’un droit de préemption en cas de vente du local loué.
Par suite, les locataires engagés par un bail dérogatoire sont exclus. Ceux qui ont conclu une convention d’occupation précaire ou par un bail soumis volontairement au Statut des baux commerciaux le sont également.

B – Les locaux

Le droit de préemption ne concerne uniquement que les locaux à usage commercial ou artisanal. C’est la clause de destination du bail commercial qui définit si cette condition est remplie. L’activité réelle du locataire n’y change rien. Les fonds à usage industriel, les emplacements de parkings et les entrepôts sont par conséquent expressément exclus.

Attention : les baux mixtes (local à usage commercial et d’habitation) permettent au locataire de bénéficier d’un droit de préférence.

C – La vente

Pour appliquer le droit de préemption, il faut que le bailleur ait « l’intention de vendre » son local.
Contrairement à la vente, les actes tels que les donations, les legs, les apports en société, échange etc … ne permettent pas au locataire de bénéficier d’un droit de préférence.

Il n’y est pas contraint non plus si son local est vendu à l’occasion d’une vente sur adjudication ou d’une vente lors d’une liquidation judiciaire ou amiable.

2. La procédure du droit de préemption 

A – L’offre du bailleur

Le bailleur qui envisage de vendre son local commercial doit avertir le locataire de manière prioritaire à son acquéreur et lui proposer de l’acheter au même prix et aux mêmes conditions. Il l’informe par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ou remise en main propre contre récépissé ou émargement ou encore par signification (acte d’huissier).

Cette notification doit indiquer le prix et les conditions de la vente envisagée à peine de nullité, comprenant notamment les modalités de paiement ainsi que les charges imposées à l’acquéreur.

Attention : A noter que le prix de vente ne doit pas comprendre les éventuels honoraires de négociation.

La reproduction des dispositions des quatre premiers alinéas de l’article L145-46-1 du Code de commerce est nécessaire pour la validité de la notification.

Si elle respecte toutes ces conditions, la notification du bailleur vaut offre de vente. En cas de notification irrégulière, le bailleur est tenu d’en renvoyer une nouvelle au locataire.

B – La réponse du locataire

Dès réception de l’offre, le locataire bénéficie 1 mois pour y répondre.  Pendant ce délai de réflexion pour le locataire, le bailleur n’a pas le droit de rétracter son offre.

Pour notifier à son tour son bailleur, le locataire peut utliser les mêmes formes que le bailleur (lettre recommandée avec accusé de réception, remise en main propre contre récépissé ou émargement, ou acte d’huissier).

La renonciation tacite du locataire à exercer son droit de préemption peut être reconnue. Il convient que le locataire ait été notifié par le bailleur comme indiqué plus haut, ne pas lui donner de réponse dans le délai d’un mois et commencer à verser les loyers au nouveau propriétaire.

Par contre, s’il souhaite exercer son droit de préemption et acquérir le bien immobilier, il dispose d’un délai de 2 mois pour la réalisation de la vente devant notaire à compter de l’envoi de sa réponse au bailleur. Toutefois le délai est porté à 4 mois si le locataire notifie son intention de recourir à un prêt.

Important : Le locataire ne peut pas négocier le prix et les conditions proposées par le bailleur. De plus, il ne peut exercer son droit de préemption et se substituer un autre acheteur.

Enfin, à l’expiration de ce délai (2 mois ou 4 mois), la vente n’a pas été réalisée, l’acceptation de l’offre de vente est sans effet.

3. Les conséquences du non-respect du droit de préférence 

En cas de non-respect du droit de préférence du locataire par le bailleur, la notification est considérée comme nulle et non-existante, ainsi le délai de réponse accordé au locataire est réputé ne jamais avoir couru.

De ce fait, toute vente qui aurait lieu avec un tiers acquéreur risquerait elle aussi d’être annulée.

De plus, si le tiers acquéreur avait connaissance que le locataire bénéficié d’un droit de préférence, il engage sa responsabilité délictuelle.

4. Les cas dans lesquels le locataire n’a pas de droit de préemption 

La loi prévoit expressément qu’un certain nombre de cessions sont exclues du droit de préférence du locataire à savoir :

  • cession unique de plusieurs locaux d’un ensemble commercial
  • cession unique de locaux commerciaux distincts
  • cession d’un local commercial au copropriétaire d’un ensemble commercial
  • cession globale d’un immeuble comprenant des locaux commerciaux
  • cession d’un local au conjoint du bailleur ou un ascendant, ou à un descendant du bailleur ou de son conjoint.
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